encore une bibliographie
Par rapprochements même approximatifs, pour le plaisir des analogismes et amalgames, plutôt que par un allégorisme dé- placé (distinguer ou chercher à voir un poltergeist en toute situation qui nous emplit), un simple poltergeist peut nous faire penser à d’autres choses que lui, par exemple en invitant à asseoir (affaler ?) des cogitations sur des mots plus ou moins mols – certes, un mur de bouquins peut s’avérer fort intimidant, et souvent pompeux (tout ça !), s’imposant de haut, comme si seuls les trucs écrits par des gens sachant écrire (et publiés par des gens sachant publier) étaient gages de l’intelligence nécessaire à la clarté de ce qui nous enserre, voire d’excellence littéraire et d’une morale sérieuse (une œuvre se doit d’être grande) ; alors qu’un lacis même fantaisiste de rayon- nages d’ouvrages, la plupart à peine par- courus, encore moins compris, peut se révéler un paravent (vain, tant pis) contre les tapages du monde, face auxquels les écrits sont si peu.
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Lors des moments de possession, un poltergeist étrique la personne emprise à son corps, lui faisant faire tout un tas de choses improbables, si ce n’est impensables pour la plupart d’entre nous – tu ne te rends vraiment pas compte. Une telle histoire surligne la prégnance, l’hétérogénéité, la va- riance du (fameux, semble-t-il) « problème corps-esprit », comme on le traite dans les études philosophiques, souvent imprégné du dualisme originel des mœurs occidentales modernes, et qui fait tant causer, que ce soit autour d’un café à propos du moindre mal de dos qui prend grave la tête, que dans les cours ennuyeux de philosophie, s’animant volontiers de débats passionnés – cartésianisme, matérialisme, idéalisme, béhaviorisme, philosophies ‘de l’esprit’ ou ‘analytiques’, etc. Qu’est-ce qu’une intention, com- ment se produit et que provoque un geste ? Que peut effectivement la volonté (Joëlle Proust, La Nature de la volonté, Folio essais, 2005), face à ce que fabriquent, souvent contre toute attente, les contingences ? Comme pouvoir à distance *, un poltergeist semble être une dialectique en soi | ençadeçapasdesoi |, un paradoxe extrinsèque – néanmoins endogène : ce que provoque le poltergeist qui gîte dans vos murs relève de certains modes d’actions et de présences typique- ment en deçà du sujet – s’éloigner, en toute objectivation, de ce sujet omnipotent, c’est se (laisser) (faire) couler dans une conception, bassement matérielle (contredisant toute méta- physique), des fluences, inspirations, suggestions, persuasions, interpénétrations et inactions, des innombrables dépendances – contrariant, dans les faits, les injonctions illusoires à ‘l’autonomie’ et à la toute-puissance de ‘l’individu’ souverain, que seule sa propre gouverne agi(te)rait, en un ballet frénétique de mouvements ‘libres’, en toute intégrité physique et spirituelle ; attributs semblant ne concerner qu’une petite quantité de personnes, bien portantes, bien dotées et… bien entourées.
(c’est plus fort que moi j’y arrive pas) (j’y peux rien) (ça m’énerve) (mais de quoi serais-je responsable, puisque de ce poltergeist tout m’incombe) (je n’ai pas pu faire ça) (ce n’était pas (vraiment) moi) (je ne te reconnais pas, là) (je préfère ne pas devoir choisir) (dis-moi ce que je dois faire)
Se faire faire (avoir prendre tenir), sans y toucher, n’y voyant guère : de loin. Béatrice Delaurenti, « La fascination et l’action à distance : questions médiévales (1230-1370) », Médiévales, n° 50, 2006 ; Nicolas Weill-Parot, « Pouvoirs lointains de l’âme et des corps », Lo sguardo, rivista de filosofia, n° 10 (« La rivoluzione interiore »), 2012.
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