la question du logement en grande-bretagne

Extraits de l’article « The Housing question », Aufheben, n° 13, 2005,  ; les passages supprimés sont indiqués entre crochets. Certaines analyses seraient probablement à recontextualiser, mais il fut ici considéré que les informations (notamment historiques) et les réflexions restaient perspicaces pour approcher la situation en ces années 2020.

Pour la grande majorité des personnes vivant dans une société capitaliste, le logement est une préoccupation constante. Trouver un endroit pour vivre, trouver l’argent pour payer le loyer ou pour continuer à rembourser les prêts hypothécaires, négocier les obligations contractuelles avec les propriétaires ou les prêteurs hypothécaires, les avocats et les agents immobiliers, sont autant de problèmes familiers et récurrents. […]
Cependant, l’omniprésence même du logement dans notre vie quotidienne a souvent fait que son importance politique et sociale est négligée par ceux qui s’intéressent à la question sociale. Pourtant, en tant qu’élément central de la reproduction de la force de travail, le logement est avant tout une question de classe. […]

Un facteur important qui a permis au Royaume-Uni de survivre à l’effondrement de la ‘bulle Internet’ (2000) a été l’expansion plutôt fortuite des dépenses publiques. Mais la bulle immobilière est peut-être plus importante que ce keynésianisme involontaire. Au cours des cinq dernières années, les prix des logements ont doublé. En empruntant sur la valeur croissante de leurs maisons, les propriétaires ont alimenté un boom de la consommation sans précédent. À la suite de ce boom alimenté par l’endettement, la dette personnelle a atteint plus de 1.000 milliards de livres sterling, soit presque la valeur de l’ensemble du PIB annuel du Royaume-Uni.

Ce qui est devenu évident, c’est que les prix de l’immobilier ne peuvent pas continuer à augmenter plusieurs fois plus vite que les salaires. À l’heure où nous écrivons ces lignes, il est manifeste que le ralentissement du marché immobilier a commencé. Il est trop tôt pour dire si la bulle immobilière va éclater avec une chute brutale des prix des logements ou si elle va se dégonfler lentement en produisant une longue période de stagnation. Bien sûr, les bulles immobilières ne sont pas nouvelles. Comme nous le verrons, depuis la déréglementation du système financier en 1970,
il y a eu de fortes hausses du prix des maisons suivies de longues périodes de stagnation des prix. Toutefois, les bulles précédentes étaient de courte durée, entre dix-huit mois et trois ans, celle-ci dure depuis près de cinq ans. […]

Du côté de la demande, les changements sociaux et démographiques font augmenter le besoin de logements. Le vieillissement de la population et l’augmentation du nombre de divorces signifient qu’un nombre croissant de parents isolés ont besoin de leur propre logement. Dans le même temps, la domination croissante de Londres attire la population anglaise vers le sud du pays. Ainsi, le nombre de logements est non seulement insuffisant pour répondre à la demande, mais il se trouve aussi en grande partie à la ‘mauvaise place’. Du côté de l’offre, l’industrie du bâtiment n’a pas réussi à compenser la chute spectaculaire de la construction publique de logements depuis la fin des années 1960. Au cours des trente dernières années, la construction de nouvelles maisons a à peine suivi le rythme de la croissance de la demande de logements, sans parler de la capacité à remplacer le parc de logements anciens : la Grande-Bretagne dispose d’un parc immobilier vieillissant et de plus en plus délabré. […]

Il semble y avoir une transition économique plus large qui a un impact important sur le marché du logement. Depuis les années 1970, nous avons connu une période d’inflation élevée et, par conséquent, des taux d’intérêt nominaux élevés. Aujourd’hui, avec la concurrence croissante des économies à bas salaires comme la Chine, il est probable que nous soyons entrés dans une période de faible inflation et, par conséquent, de faibles taux d’intérêt nominaux. Des taux d’intérêt plus bas signifient que les acheteurs de maisons peuvent emprunter davantage pour acheter une maison.
Dans ce texte, nous nous limiterons à placer la situation actuelle du logement dans son contexte historique.

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plan
1. le logement sous le capitalisme
2. le logement et la reproduction de la force de travail
3. l’histoire du logement en grande-bretagne
4. le logement au 19e siècle
5. le monopole de classe sur le foncier
6. la crise du logement de la première guerre mondiale
7. l’occupation par le propriétaire et le développement de la banlieue
8. la banlieue et la consolidation de la classe moyenne inférieure
9. le logement après la seconde guerre mondiale
10. la crise des années 1970
11. l’ère thatcher et le nouveau régime du logement
12. le new labour et la crise du logement